Des données un bien commun

Des données un bien commun

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Un TL;DR d'une lecture matinale proposée par Evgeny Morozov chercheur et écrivain, spécialiste des implications politiques et sociales du progrès technologique et du numérique.

https://blog.mondediplo.net/2018-04-10-Pour-un-service-public-des-donnees

Pour un service public des données

Les seules interventions permises dans ce monde sont les initiatives visant à renforcer les droits des consommateurs vis-à-vis de leurs données, favoriser la concurrence et peut-être, prélever plus d’impôts (la spécialité des technocrates européens) ou concevoir des services et technologies encore meilleurs (la chasse-gardée des ingénieurs de Facebook). Dans ce monde merveilleux, l’histoire est bel et bien finie : non seulement le capitalisme règne sur le monde, mais de surcroît il fonctionne et répand la prospérité et la méritocratie partout où il passe.
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Cette conception du monde se heurte à la réalité empirique : la réussite des géants de la technologie aux États-Unis et en Chine est la conséquence directe d’une intervention étatique forte, et non d’un laisser-faire. L’armée américaine a mis des décennies à financer la construction de la Silicon Valley et presque autant à mettre au point un système de marché mondial pour empêcher d’autres pays de développer des technologies similaires.
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En outre, une bonne partie des données que nous générons, quand nous marchons dans une ville financée par la fiscalité, équipée d’un système d’éclairage intelligent également financé par la fiscalité, s’apparentent davantage à des données pour lesquelles nous avons des droits d’utilisation collectifs et sociaux en tant que citoyens, plutôt que des droits individuels en tant que producteurs ou consommateurs.
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Il ne s’agit pas d’abolir la tradition européenne de la protection des données, mais de changer de perspective. Au lieu de continuer d’avancer dans une voie qui prétend exister en dehors de l’histoire, en négligeant les pressions exercées par le capitalisme mondial, la montée de la Chine ou l’influence grandissante qu’exerce la Silicon Valley sur le modèle social-démocrate européen, il faudrait allier la protection des données à un projet économique et démocratique dynamique, afin que les citoyens ne perdent pas le contrôle des précieuses ressources (les données) et infrastructures (l’IA) sur lesquelles se fonderont les futures institutions politiques et économiques.
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Il existe trois scénarios politiques. […]
Nous pouvons conserver le modèle actuel, en laissant Facebook, Alphabet, Amazon, etc. s’arroger de plus en plus de fonctions qui incombent à l’État. […]
La deuxième voie serait celle d’un anti-mondialisme douteux incarné par Steve Bannon, visant à retrouver une certaine autonomie vis-à-vis des géants de la technologie en donnant un pouvoir excessif au secteur financier […]
La récente controverse sur les données fournit enfin l’occasion de mettre en place une politique véritablement décentralisée et émancipatrice, par laquelle les institutions de l’État (du niveau national au niveau municipal) seront déployées pour reconnaître, créer et favoriser de nouveaux droits sociaux aux données. Ces institutions devront regrouper les données dans des groupes aux conditions d’accès différentiées. Elles s’assureront aussi que les entités qui proposent de bonnes idées, sans grand intérêt commercial mais prometteuses d’un point de vue social, reçoivent des financements pour les réaliser à partir de ces groupes de données.